Histoire du Stade Jean Bouin

En 1926, le Stade Jean Bouin était inauguré par le Cercle Athlétique de la Société Générale en remplacement de son ancien terrain situé sur les actuels courts de Roland Garros. Un siècle plus tard, il est toujours l’un des plus importants stades de la Capitale.


Le Club Athlétique de la Société Générale

Comme son nom l’indique, le CASG constitue l’émanation sportive de la Société Générale. Le club fondé en 1903 s’installe dès 1907 sur un terrain au milieu des serres de la ville de Paris, là où siège aujourd’hui le Stade Roland Garros. En 1916, le stade prends le nom de Jean Bouin en souvenir de l’ancien grand athlète marseillais, sociétaire de la CASG, multiple recordman du monde, et tombé au front en septembre 1914.

Annonce du baptême du stade dans l’Auto

Une fois la Grande Guerre achevée, et notamment parce que la Fédération France de Football nouvellement née interdit les clubs corporatifs, le club opère un changement de statut, qui s’accompagne d’un changement de nom: Société Générale devient Sports Généraux. Un nom à propos pour un club résolument omnisports qui propose à ses membres la pratique de l’athlétisme, du hockey sur gazon, du football, du rugby ou du tennis.

Les « Banquiers » doivent cependant bientôt quitter leur terrain des serres désormais confié au Stade Français qui doit y permettre avec l’aide du Racing l’aménagement du Stade Roland Garros. Le club n’aura pas à se déplacer de beaucoup, c’est un terrain situé à quelques centaines de mètres situé Porte Molitor qui va désormais les accueillir. Sur ce terrain libéré par la destruction des fortifications de la ville, les travaux du nouveau stade débutent en 1925 en suivant les plans de l’architecte Lucien Pollet, le même qui construira ensuite la piscine Molito voisine,

Les 2 et 3 octobre 1926, le nouveau terrain du CASG est inauguré qui comme son prédécesseur prend le nom de Jean Bouin. La première journée d’inauguration est dédiée au football (réception de l’Olympique de Marseille, récent vainqueur de la Coupe de France). Le lendemain, la section rugby affronte une sélection d’Armagnac-Bigorre. Enfin, des épreuves d’athlétisme entre les meilleurs athlètes français et européens complètent le programme.

Le nouveau stade est confié au club par concession régie par une convention signée pour 40 ans. Cette convention sera par la suite renouvelée en 1965, en 1990, puis en 2004 avec le Paris Jean-Bouin du Groupe Lagardère qui a depuis 2002 pris le relais de la Société Générale.

Jean Bouin et le Parc des Princes

Rugby et athlétisme à Jean Bouin

Si les premières décennies du CASG ont été marquées par la section football du club (vainqueur de la Coupe de France 1919 et 1925), la section rugby des « Généraux » prend à partir des années 30 le dessus sur la branche football qui disparaît rapidement des hautes sphères du football français. L’enceinte accueille également les rugbymen du Stade Français, et plus occasionnellement ceux du Racing Club de France, deux clubs tout aussi historiques l’un que l’autre et cumulant alors 11 titres de champions de France. Durant quelques saisons, ces trois clubs se côtoieront ainsi en première division à Jean-Bouin, faisant de l’enceinte le cœur névralgique du rugby de club de la capitale.

Les années 30 sont également marquées par la présence de l’athlétisme. Dès les années 20, de nombreuses réunions y sont organisées chaque année (Championnats de Paris, Prix de la République…). Mais c’est surtout avec la signature en 1930 de Jules Ladoumègue au CASG que la piste parisienne de 450 m gagne une réputation internationale. Le natif de La Bastide près de Bordeaux y bat 3 de ses 6 records du monde entre 1930 et 1931, ceux du kilomètre, du 1 500m et du mile. Jusqu’à 15 000 spectateurs assistent aux multiples exploits du demi-fondeur français.

Athlétisme à Jean Bouin

L’après-guerre

A partir des années 50, Jean Bouin connait une certaine désaffection. Le Stade Français disparaît ainsi des divisions nationales et se replie sur ses installations de la Faisanderie, tandis que le Racing se rapproche de son siège à Colombes et délaisse également Jean Bouin. Quant au CASG, il ne fait rien pour enthousiasmer les foules parisiennes. Après une dernière saison disputée dans l’élite en 1952, il ne peut plus guère que lutter pour ne pas sombrer dans les rangs régionaux. Les « majestueuses et romantiques » foulées de Jules Ladoumègue et les clameurs qui l’accompagnaient ne sont également plus qu’un lointain souvenir.

Inchangée depuis l’ouverture du stade en 1925, la physionomie de Jean Bouin est subitement modifiée en 1968, date des travaux de construction du boulevard périphérique qui entraînent la refonte du stade (ainsi que celle du Parc des Princes). Une nouvelle tribune est ainsi construite en lieu et place des anciens gradins découverts, tandis qu’un nouveau bâtiment est aménagé afin d’accueillir un club-house et les bureaux du club. Dans cette nouvelle configuration, le stade rouvre en 1970.

Cette réouverture s’accompagne de timides pas de Jean Bouin dans le monde du football professionnel, d’abord via le Racing Paris-Neuilly, puis par son avatar le RCF Paris-Joinville. L’enceinte accueille également quelques rencontres des premières années du Paris Saint-Germain qui trouvera cependant avec le Parc des Princes, un stade plus au niveau de ces ambitions.

En 1975, l’enceinte se dote d’un gymnase, tandis qu’une nouvelle piste d’athlétisme en Résisport est inaugurée en 1982. Les grandes réunions d’athlétisme font ainsi leur retour à Jean Bouin,notamment le Meeting de Paris sponsorisé par BNP. Le 13 juillet 1985, profitant de conditions exceptionnelles, Sergueï Bubka devient le premier homme à franchir à Jean Bouin la barre symbolique des 6 mètres. Une hauteur encore jugée inaccessible quelques années auparavant. L’enceinte parisienne accueillera son dernier meeting d’envergure en 2007.

Jean Bouin dans les années 90

Max Guazzini et le Stade Français

Privé de rugby de haut niveau depuis des décennies, le public de Jean Bouin y reprend goût en 1985 avec l’organisation du Challenge Jean Bouin. Une rencontre faisant office de petite finale du Championnat de France et opposant les deux perdants des demi-finales en lever de rideau de la grande finale jouée le même jour au Parc des Princes. Ce challenge récompensé par le Trophée Société Générale prend fin en 1994. L’expérience convainc cependant Max Guazzini que l’ancien cœur du rugby parisien peut de nouveau battre.

Président depuis 1992 d’un Stade Français anonyme en Deuxième Division, il fusionne en 1995 le club avec le CASG, alors en Groupe B. Après deux montées successives, le Stade Français CASG rejoint l’élite en 1997. D’importants travaux de rénovation de Jean Bouin sont dès lors entrepris. De nouveaux sièges aux couleurs de la ville remplacent les anciennes banquettes en bois presque aussi vieilles que le stade, une tribune de presse est aménagée en partie haute de la tribune présidentielle, l’éclairage et la sonorisation sont remis aux normes, une nouvelle tribune apparaît en virage, les joueurs bénéficient de nouveaux vestiaires, etc.

Les travaux s’achèvent en 1999, entre-temps, Max Guazini avait réussi son pari sportif en faisant sacré son club champion de France en 1998. Ces succès sportifs s’accompagnent d’une belle réussite populaire: lorsqu’il avait emménagé sur le terrain du CASG, le Stade Français peinait à attirer quelques dizaines de spectateurs et devait recourir à la politique de la gratuité pour donner un peu de vie aux travées de Jean Bouin. En quelques saisons à peine, l’enceinte parisienne et ses 12 000 semblent soudainement trop petites pour accueillir un public attiré par le renouveau du rugby parisien.

La nouvelle tribune en virage construite après le retour du Stade Français en Première Division.

Jean Bouin, le Parc, le Stade de France et Max

Pour répondre aux demandes de ce nouveau public, le club fait dès 1998 le pari du Parc des Princes, d’abord dans une configuration réduite à 20 000 places, puis bientôt à guichets fermés devant plus de 45 000 personnes. Cette nouvelle cohabitation entre footballeurs et rugbymen dérange les dirigeants du Paris Saint-Germain qui font tout pour contrecarrer les plans du président Guazzini. Faisant face à un nouveau refus du PSG de céder leur pelouse pour une rencontre de Championnat face à Toulouse, le Stade Français se lance dans le défi de remplir le Stade de France.

Le 15 octobre 2005, le Stade français bat ainsi le record mondial d’affluence pour un match de championnat de rugby à XV en saison régulière avec 79 502 spectateurs. Une expérience renouvelée chaque saison depuis en Championnat ou en Coupe d’Europe, le record d’affluence s’établissant aujourd’hui à 79 783 spectateurs pour un duel entre les deux Stades le 22 mars 2008. Les dirigeants du PSG en sont pour leur frais, jamais une simple rencontre de championnat de football n’a attiré autant de monde en France.

Ces délocalisations multiples n’écornent cependant pas la volonté de Max Guazzini de posséder un stade de 20 000 places propre à répondre aux exigences du sport professionnel (confort, capacité, accueil des partenaires…). Un premier projet dans la lignée de Paris 2012 devait ainsi faire d’un Jean Bouin agrandi et rénové le site olympique du hockey sur gazon. Malgré le choix en 2005 de Londres pour accueillir les Jeux, le projet de nouveau Stade Jean Bouin est maintenu.

L’extension de Jean Bouin est officialisés 12 février 2007 par le vote du Conseil de Paris qui donne un avis favorable (80 voix pour, 59 contre) à l’agrandissement du Stade Jean Bouin à 20 000 places. Les incessantes querelles politiciennes de la Capitale et l’antagonisme d’une partie des riverains retarderont de plusieurs années le projet dont les travaux ne débutent qu’à l’été 2010. Durant les travaux, le Stade Français s’exile au Stade Charléty.

« Aaaand It’s gone. »

Le 30 août 2013, le nouveau Jean Bouin ouvre enfin ses portes à l’occasion de la réception de Biarritz en Top 14. Le stade est comble, 20 000 personnes assistent à cette première.

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