Le stade du rugby nantais
En 1935, Auguste Pageot devient maire de la ville des Ducs de Bretagne. Dans ses projets, le réaménagement du Champ de Mars et la création du futur Palais du Champ de Mars. Ce projet signe également l’arrêt de mort de l’ancien Parc des Sports de la ville qu’on y a construit en 1911.
Pour remplacer le stade du Champ de Mars, la municipalité opte pour le quartier voisin du Quai Malakoff, en particuliers sur un vaste terrain récupérée au fleuve grâce au récent comblement de la Loire. Le chantier est confié à l’architecte nantais Camille Robida. Le stade sera construit de deux tribunes pouvant accueillir un peu plus de 2 000 spectateurs assis.
Les travaux débutent en 1937, et s’avancent à un rythme élevé. Dès le 3 octobre, le Stade Nantais Université Club (SNUC) y fait ses débuts à l’occasion d’une rencontre du Challenge Yves du Manoir face au Racing. Le temps de derniers travaux, le Parc des Sports de Malakoff n’est officiellement inauguré que que le 28 novembre à l’occasion d’un match entre le SNUC et le Stade Bordelais.
A Malakoff, les rugbymen (à XV) sont rejoints par ceux à XIII du tout nouveau Nantes XIII. La cohabitation des deux codes durera deux saisons, sans qu’elle ne semble engendrer les dramatiques réactions que l’on verra dans d’autres villes françaises.
Malakof est donc bel et bien une enceinte de rugby. Seuls quelques rares matchs de football comme les finales de la Division d’Honneur de la Ligue Atlantique sont organisées dans le futur temple du FC Nantais.
Le FC Nantes
Le 21 avril 1943, cinq clubs nantais, la Saint-Pierre de Nantes, la section football du SNUC, l’AC Batignolles, l’ASO Nantaise et la Mellinet décident d’unir leurs forces suivant le mot d’ordre du président de la Mellinet, un certain Marcel Saupin : « Petite équipe aujourd’hui, elle sera grande un jour si nous œuvrons ensemble. » Cette union dont Marcel Saupin est le principal instigateur donne naissance au FC Nantes.
Le comité directeur de la nouvelle association intervint alors auprès de la mairie nantaise pour se faire allouer en alternance le Stade Malakoff avec le SNUC. Malheureusement, le stade est victime des bombardements meurtriers de septembre 1943 et n’est plus en état de recevoir la moindre équipe et ne rouvre qu’en octobre 1944 obligeant le STade Nantais à jouer les premiers matchs de son histoire dans d’autres stades de l’agglomération.
A la libération, le FC Nantes s’empare de Malakoff et attire rapidement du monde à Malakoff, probablement plus que ne l’a jamais fait le rugby qui délaisse le futur Stade Marcel Saupin et se replie sur ses propres installations du Stade de Malville (actuel Stade Pascal Laporte).
Grace au football, les record tombent rapidement à Malakoff. Dès la saison 1945-46, la venue du Stade Français permet d’établir un premier record avec 8 000 spectateurs. La barre des 10 000 spectateurs est rapidement franchie, puis 12 000, et enfin 13 000 grâce à de nouveaux gradins installés en virage.
Le novembre 1954, Malakoff bat son record d’affluence avec 13 500 spectateurs pour un match de la première Coupe du monde de rugby à XIII qui voit la France l’emporter sur l’Australie. C’est d’ailleurs, la seule rencontre internationale (tous sports confondus) jamais disputé à Malakoff. Pour répondre à la demande du public nantais, de nouvelles tribunes sortent de terre à l’été 1955. La capacité du stade passe alors à 20 000 places.
Enfin en Première Division
Alors que le stade s’équipe d’installations nocturnes en 1957, 16 959 Nantais célèbrent le premier juin 1963, 20 ans après la naissance du club, la montée des Canaris en première division suite à une victoire face à Sochaux (2-O). 16 959 Nantais, mais pas Marcel Saupin dont le décès 6 mois plus tôt endeuilla le club. Le « Lion » ne verra jamais son club en première division. Deux ans plus tard, le stade sera renommé en son honneur.
Nantes impose son style au championnat de France, et Marcel Saupin demeure une citadelle imprenable, le FC Nantes y signant une série d’invincibilité à domicile qui dura plus de trois ans: du 22 octobre 1964 au 11 novembre 1967. Cette période est marquée en 1965 par le premier titre de champion de France du club, soit deux saisons seulement après l’ascension du club en première division.
Profitant de la promotion qu’offre le premier titre du FC Nantes, le stade est rénové et agrandi à 25 000, puis 29 500 places (13 500 places assises). Le stade dont trois des quatre tribunes ont été reconstruites est inauguré, dans ce qui apparaîtra comme sa configuration définitive, le 26 juillet 1969. Les rencontres entre Nantes et Saint-Etienne constituent alors le summum du football français. C’est d’ailleurs au cours d’un de ces sommets que Marcel Saupin connaîtra sa meilleure affluence. Le 20 mars 1976, ils sont 26 744 à applaudir le succès des coéquipiers d’Henri Michel sur les Foréziens (3-0).
La volonté de la part de la mairie de doter sa ville d’une structure capable de recevoir de grands événements sportifs ou culturels à commencer par l’Euro 84, mais aussi celle du président du FC Nantes, Louis Fonteneau, d’équiper son club d’une enceinte plus adaptée à la pratique du sport professionnel allaient sonner le glas de Marcel Saupin.
Un nouveau stade
Déjà, en 1978, Fernand Sastre, alors président de la Fédération française de football, avait prévenu: « Vous savez, il y a de fortes chances pour que la France organise le Championnat d’Europe en 1984. Si Nantes veut accueillir des matches, vous devez avoir un nouveau stade..». La municipalité voit là une véritable opportunité pour bénéficier d’aides financières importantes de l’État, du département ou de la région. Les temps étant à l’orthodoxie financière, la construction d’un nouveau stade sur les seuls deniers de la ville aurait été très difficile à faire passer aux yeux des contribuables.
Au siège du FCN, l’idée fait également son chemin. Louis Fonteneau, président du club depuis 1969, est l’un des plus ardents défenseurs du projet. Les inquiétudes naissent pourtant à l’idée de quitter le Stade Marcel Saupin. Un stade qui a accompagné les Canaris tout au long de leur histoire, un stade, certes d’une capacité limitée (environ 27 000 places à l’époque), mais où le public est proche de l’action, et où les joueurs se sentent chez eux. Mais la volonté de Louis Fonteneau couplée à celle du conseil municipal, finira par triompher des inquiétudes.
« Avec sur le plan confort, 13 500 places debout et autant de places assises, Saupin n’est pas digne d’une grande équipe. Le spectateur de football a droit à autant de considération que celui du théâtre »
La Beaujoire
Le projet de la Beaujoire est officialisé le 25 novembre 1980, la première pierre posée deux années plus tard, le 21 juin 1982. La réalisation de l’oeuvre est confiée à l’architecte Berdje Agopyan. Ce dernier fait le double pari de réussir à intégrer parfaitement la construction dans son environnement, et de tenir les délais très courts qui mènent à l’Euro 84. Le coût du projet, financé à hauteur de 50% par l’Etat, sera évalué à 100 MF et nécessitera jusqu’à 250 travailleurs.
Les Nantais font leurs adieux à Marcel Saupin le 28 avril 1984. Le destin faisant bien les choses, un dernier Nantes-Saint-Etienne est proposé à l’antique fief nantais. Ce soir-là, ils sont 15 621 à assister à la victoire nantaise et au but vainqueur de Vahid Halilhodzic. La Beaujoire, elle, est inaugurée 10 jours plus tard, le 8 mai 1984 .
Le stade est inauguré le 8 mai 1984 en présence de 30 000 personnes et de la Ministre des Sports, Edwige Avice, un match amical opposant le FCN à la Roumanie y est organisé (victoire 1-0 de la Roumanie, plus un poteau d’un jeune joueur roumain âgé de 19 ans, Gheorghe Hagi…). Avant même d’apercevoir leurs joueurs y disputer un premier match officiel (victoire face à Toulon le 17 août par 3 buts à 1), les Nantais assisteront au triomphe de l’équipe de France qui étrille la Belgique le 16 juin à la Beaujoire 5-0. Une affluence record est annoncée (51 359 spectateurs). Elle ne sera jamais dépassée, le record d’affluence pour un match du FCNA s’établissant à 44 285 spectateurs pour une rencontre face à Bordeaux l’année suivante.
Suite à l’inauguration de la Beaujoire et l’exil des professionnels à la Beaujoire, Marcel Saupin allait prendre l’habitude de recevoir les équipes juniors et réserves du club nantais. Une manière de poursuivre l’Histoire en quelque sorte. En 2006, trois des tribunes ont été démolies pour laisser place à un ensemble immobilier, seul le terrain engazonné subsiste ainsi que la tribune qui fait face à la Loire, dont la réhabilitation devrait de nouveau permettre la tenue des rencontres de la réserve d’ici deux ans.
Lors de son inauguration, le stade est sujet à controverse, et même si la plupart louent l’esthétisme de l’œuvre de Berdje Agopyan, « La Beaujoire est une incontestable réussite esthétique. C’est un bel écrin moderne, aux courbes si agréables à contempler. » Beaucoup se plaignent du vent qui s’engouffre de toutes parts, de la distance séparant les joueurs des spectateurs, de la froideur du béton armé, des grillages… Dans un premier temps, nombreux sont à regretter Marcel Saupin, les scènes de liesse populaire qui suivront en 1995 le 7e titre du club ou l’épopée en Ligue des Champions l’année suivante achevée en demi-finale face à la Juventus de Turin, permettront au public nantais d’-enfin- s’approprier le site et de tourner la page de Marcel Saupin.
Malgré, la Beaujoire, le stade de Malakoff sera conservé par la ville de Nantes. Laissé en l’état pendant plus de 20 ans, le stade est démoli en grande partie en août 2006. Seule la tribune Nord, qui porte désormais le nom d’Oscar Muller, et la pelouse sont conservées afin de pouvoir continuer d’accueillir l’équipe réserve du FC Nantes.
Bien ,bel article,l’histoire c’est important,une manière de montrer que rien ne se fait facilement.René.
superbe article nostalgique
Merci pour ce bel article !
Bonjour.
Fan depuis toujours je souhaiterai acheter la photo du stade en couleur avec les joueurs de La cigogne.
Merci pour l’article et si vous avez un plan je suis preneur.