Vers la fin du XIXème siècle apparaissent les premières « sociétés sportives » marseillaises. Elles ont pour nom SC Marseille ou US Phocéenne. Le dernier né en date (1897), le FC Marseille fusionne en 1899 avec le club d’escrime l’Epée pour former l’Olympique de Marseille. Bénéficiant notamment de l’appui de la bourgeoise, le club se tourne à ses débuts vers le rugby, dont il devient très vite le plus beau représentant marseillais. Après un premier match de football disputé en 1900 au Parc Borély, la section football de l’OM ne prend réellement corps qu’à partir de 1902. Deux ans plus tard, le club dispute les phases finales du Championnat de France USFSA.
L’Huveaune avant le Vélodrome
Evoluant depuis ses débuts sur un terrain de fortune du Parc Borély où il faut porter les poteaux de but et tracer les lignes à chaque match, ainsi que sur un champ de manœuvres jouxtant le Parc Chanot, le club se fixe vers 1904 à mi-chemin entre le parc Borély et la plage du Prado sur un nouveau terrain, propriété de Paul Le Cesne qui deviendra de 1909 à 1921 président du club olympien.
Le site, encore dépourvu de tribune, et que l’on prend déjà l’habitude de nommer « Stade de l’Huveaune » en référence au nom du cours d’eau qui le longe, enregistre dés cette époque de très bonnes affluences. Ainsi, le 13 novembre 1910, mille spectateurs se pressent autour du terrain l’Huveaune pour suivre l’opposition entre l’Olympique et le Stade Helvétique (1-3). Bientôt, une tribune de 5 000 places accueillera ces supporters.
Le Stade Helvétique est alors le plus sérieux concurrent de l’Olympique. Ce club formé presque exclusivement de Suisses et de quelques Anglais allait éclipser presque totalement l’Olympique durant les dernières années menant à la Grande Guerre en remportant l’ensemble des Championnats du Littoral et étant même sacré champion de France USFSA en 1909, 1911 et 1913. Pour la petite histoire, la finale pour le titre 1911 s’était d’ailleurs disputée à l’Huveaune. Le club, comme tant d’autres ferme ses portes durant la Grande Guerre, laissant l’Olympique de Marseille libre de toute rivalité locale. Renforcés par des transfuges du Stade Helvétique, l’OM atteint la finale du Championnat USFSA en 1919 (défaite 4-1 face au Havre).
En 1921, Marseille et son Stade de l’Huveaune accueillent pour la première fois de leur histoire l’équipe de France (défaite 1-2 face à l’Italie). Le stade déborde. Il déborde de plus en plus régulièrement pour les rencontres de l’OM également. Au début des années 20, les dirigeants marseillais mettent en chantier la rénovation de l’Huveaune: Les « populaires » sont couvertes et la « Grande Tribune » gagne deux petites tribunes sur ces cotés. Pour palier aux dépenses (100 000 francs), le club fait appel à la générosité de ses 1 500 adhérents sous forme de prêt. L’Huveaune peut dès lors accueillir environ 15 000 spectateurs.
Dans ce nouveau l’Huveaune – que l’on baptise du nom de Fernand Bouisson, ancien capitaine de la section rugby du club et futur président de la Chambre des Députés dans les années 30 –, le club s’impose dès avant la Seconde Guerre Mondiale comme un des meilleurs clubs français, s’adjugeant les championnats du Sud-Est en 1927, 1929, 1930 et 1931, les Coupes de France 1924, 1926, 1927 et le Championnat de France Amateur en 1929. Très logiquement retenu pour participer au début du football professionnel français en 1932, le club olympien doit pourtant patienter jusqu’en 1937 pour remporter son premier championnat de France professionnel.
Alors que le club est tout à la joie de son premier titre, sort au cinéma le film « Les Rois du Sport » avec Fernandel dont une longue scène de 10 minutes est tournée entièrement à l’Huveaune avec le concours des joueurs de l’Olympique de Marseille. L’Huveaune rentre dans le cercle très fermé des stades qui auront eu droit aux honneurs du cinéma.
Toujours en 1937, un autre événement va marquer durablement la vie du sport marseillais, l’ouverture d’un nouveau stade: le Stade Vélodrome.
Le Stade Vélodrome
Dès 1918, Edouard Gay, conseiller municipal de la ville évoque l’idée de construire un grand stade omnisports au cœur de la ville. L’idée rebondit 10 ans plus tard grâce à Gabriel Vallerian, adjoint aux Sports à la mairie de Marseille et futur directeur du Vélodrome.
Le manque d’infrastructure sportive de la cité phocéenne est alors criant. A cette époque, l’Huveaune est bien le seul stade d’envergure de la ville. Un stade qui pour la mairie a le double désavantage d’une capacité réduite (15 000 places), et d’un propriétaire, l’Olympique de Marseille, peu enclin au partage d’un site qu’il occupe depuis 1904 et dont il a financé l’aménagement avec l’aide de ses adhérents. Par ailleurs, la prochaine désaffection du Vélodrome Jean Bouin menace à terme l’avenir du sport cycliste marseillais.
En 1930, Gabriel Vallerian présente devant le conseil municipal un rapport proposant d’affecter des terrains situés sur le Parc Amable-Chanot à la réalisation d’un stade olympique et d’un Palais des Sports de 15 000 places. Le refus de la part du Conseil d’Etat d’un prêt de 11.5 MF donnera un coup d’arrêt au projet, cependant l’étude permet d’arrêter le futur site d’implantation du stade à deux pas du boulevard Michelet.
Mais bientôt, le projet est relancé. Amputé de son Palais des Sports, l’ambition de la ville se résume à l’aménagement d’un stade vélodrome d’une capacité de 35 000 places (dont 12 000 couvertes). Début 1935, la maîtrise d’œuvre est confiée à l’architecte parisien Henri Ploquin, reconnu alors dans le monde de l’architecture pour avoir contribué trois années plus tôt à la réalisation du Stade Municipal de Vichy. Le 28 avril 1935, la première pierre du Stade Vélodrome est posée par le maire de Marseille, le Docteur Ribot. Le chantier durera 26 mois.
Le 13 juin 1937, le Vélodrome est enfin inauguré. 25 000 spectateurs viendront accompagner le maire de la cité, Henri Tasso et le Ministre des Sports, Léo Lagrange à la découverte de ce nouveau temple du sport marseillais. Au programme des réjouissances: meeting d’athlétisme et réunion cycliste, ainsi que les premiers pas au vélodrome du tout récent champion de France professionnel. En ce 13 juin 1937, le club phocéen vint étrenner son nouvel antre contre le Torino (victoire 2-1). Pour l’anecdote, l’Olympien Zermani sera le premier buteur de l’histoire du Vélodrome.
La presse, longtemps sceptique sur la nature du projet, un stade « qui ne sera rempli que quelques fois l’an », lisait-on alors, oubli ses préjugés le jour de l’inauguration. Le Vélodrome fait déjà les gros titres: « Marseille a enfin un stade digne d’elle », « le plus beau de France ».
Le Sémaphore de Marseille du 15 juin s’enflamme:
« Les tribunes et gradins si largement garnis, sous un soleil qui apportait son concours éblouissant à cette fête du sport, offraient un spectacle inoubliable tant le cadre était enchanteur, devant cette verte prairie qui forme le terrain de football et que ceinture la piste cendrée de course à pied ainsi que la piste cycliste dont la tonalité rose accentue le plaisir des yeux. ».
Le Vélodrome est aux yeux de tous une réussite, mais l’OM restera longtemps hostile au Stade Vélodrome, le « stade de la Mairie ». Parmi les plus anciens supporters olympiens, on en retrouve beaucoup qui regrettent le Stade de l’Huveaune, propriété de l’OM et dont certains avaient concouru à l’aménagement de l’Huveaune au début des années 20.
Un stade de secours
Durant la Seconde Guerre Mondiale, le Vélodrome est successivement occupé par les armées françaises, allemandes et américaines le club reprend ainsi le chemin de l’Huveaune durant la plus grande partie du conflit mondial. Dépossédé à la Libération de l’Huveaune, le club s’installe de nouveau au Vélodrome, de manière définitive pense t-on alors. L’OM retournera pourtant à l’Huveaune encore à deux reprises.
En 1965, le nouvel homme fort de l’Olympique de Marseille, Marcel Leclerc, réactive la polémique des stades. Devenu président d’un club évoluant en D2, il exige de la part de la mairie une réduction du coût de location du Vélodrome, et l’octroi au club d’une subvention jusque-là inexistante. Devant le refus de la mairie, il décide de plier bagage jusqu’à nouvel ordre au Stade du l’Huveaune rénové pour l’occasion. Les Olympiens n’y passeront qu’une seule saison (1965-1966). La municipalité, mise devant le fait accompli, accepte les conditions de Marcel Leclerc dès la saison suivante.
Enfin, le club signera un ultime retour à L’Huveaune durant la saison 1982-1983, le Stade Vélodrome étant en plein chantier dans la perspective de l’Euro 84.
Il est également à noter que l’OM ne sera pas le seul à tenter de faire revivre l’Huveaune. A la fin des années 40, une deuxième équipe professionnelle tentera d’émerger à Marseille: le Groupe Sporting Club Marseille. Invité à participer au championnat de deuxième division en 1949, le club connait un beau succès d’estime à ses débuts (5 433 spectateurs pour sa première sortie de la saison à l’Huveaune), avant d’être victime de problèmes financiers et d’abandonner la compétition au cours de sa seconde saison d’existence.
Depuis le dernier retour de l’OM à L’Huveaune en 1982, le Stade Fernand Buisson s’est mis pendant près de deux décennies au service des équipes jeunes de l’OM. L’Huveane ferme ses portes en 1998 et est démoli peu après pour laisser place à un projet immobilier.